James, Tim Booth, Manchester, une époque bénie (suite et... longue... fin).
Avez-vous déjà vu Tim Booth sur scène ? Dingue, non ? Cette manière d'entrer littéralement DANS la musique, par la voix, par la danse, par les jambes, par le cou, par la peau... Cette manière de devenir lui-même musique. D'en devenir le médium, le matériau conducteur.
Si James, en concert (en tout cas jusqu'à 1991 ! - car après je ne sais plus trop, "j'ai un peu lâché l'affaire", comme disent nos amis les vrais jeunes), est une décharge électrique qui ne demande qu'à vous secouer, alors le corps dansant de Tim Booth est la fourchette qui s'enfonce dans le fil. Bzzzzzzzzzzzzzzzzooooiiiingzzzrrrzzzzz !!!!
En fait, je crois qu'il y a deux James. Celui d'avant le succès, et celui d'après Come home et surtout Sit down, c'est à dire cette époque, à la charnière des années 80-90, où n'importe quel groupe de Manchester (même d'assez barbants comme Northside ou les Paris Angels) connaissaient une gloire fugace. Fait amusant : il me revient que James, clairement au dessus du lot musicalement (et partageant à ce titre le haut du panier avec les Stone Roses et Happy Mondays) gagnait à l'époque davantage d'argent avec la vente de ses multiples tee-shirts joliment logo-tisés qu'avec ses disques. Etre fan de James, et l'afficher par le port d'un tee-shirt à fleur, était alors the coolest thing to do.
Je me rappelle d'ailleurs que leur manageuse (je crois qu'elle s'appelait Martine... et ne fut-elle pas la première épouse de Booth ?) m'avait expliqué à l'époque qu'elle avait le sentiment de faire "un autre métier", c'est à dire de faire tourner une usine de vêtements, et que ça lui prenait l'essentiel de son temps, James ayant alors une ligne de plusieurs dizaines de motifs et couleurs, en tee-shirts manches courtes ou manches longues mais aussi en sweat-shirts à capuche... J'ajoute que les not-so-great Inspiral Carpets connaissaient à peu près le même succès textile, avec leurs célèbres tee-shirts à vache... et d'ailleurs, tiens, je me pose la question, chers amis : comment avons-nous été assez cons pour porter des tee-shirts pareil, avec des grosses meuh meuh et des slogans façon Cool as fuck ???. Ah, âge béni de l'insouciante jeunesse...
Anyway. Vous n'êtes pas venu lire un blog sur les sweats à capuche, n'est-ce pas ? Alors revenons à la musique.
Le James que j'aime, sans vouloir être snob (j'espère), meurt un peu avec ses tubes. Non pas que tout ce qui vienne après ces "hits" joyeux et fédérateurs soit de piètre qualité, loin de là, mais il me semble que le groupe était plus intéressant quand il n'avait pas encore trouvé "sa" formule magique, ses sonorités bien à lui, sa rondeur un peu pompière, ses effets de manche et ses rythmiques carrées comme des bûcherons bavarois dans la force de l'âge.
Comme je l'écrivais dans le post précédent à propos du cas (rarissime) des Villagers, James a très vite trouvé son identité sonore, sa carte musicale génétique. Peut-être à l'instinct, peut-être par accident, peut-être aussi à force de combats internes, de frustrations et... de compromis (on aura confirmation dans les années 90 que la relation entre Tim Booth et Gavan Whelan avait été, lors des premières années, souvent orageuse, jusqu'à des bagarres en répétition).
En fait, je crois qu'il y a deux James. Celui d'avant le succès, et celui d'après Come home et surtout Sit down, c'est à dire cette époque, à la charnière des années 80-90, où n'importe quel groupe de Manchester (même d'assez barbants comme Northside ou les Paris Angels) connaissaient une gloire fugace. Fait amusant : il me revient que James, clairement au dessus du lot musicalement (et partageant à ce titre le haut du panier avec les Stone Roses et Happy Mondays) gagnait à l'époque davantage d'argent avec la vente de ses multiples tee-shirts joliment logo-tisés qu'avec ses disques. Etre fan de James, et l'afficher par le port d'un tee-shirt à fleur, était alors the coolest thing to do.
Je me rappelle d'ailleurs que leur manageuse (je crois qu'elle s'appelait Martine... et ne fut-elle pas la première épouse de Booth ?) m'avait expliqué à l'époque qu'elle avait le sentiment de faire "un autre métier", c'est à dire de faire tourner une usine de vêtements, et que ça lui prenait l'essentiel de son temps, James ayant alors une ligne de plusieurs dizaines de motifs et couleurs, en tee-shirts manches courtes ou manches longues mais aussi en sweat-shirts à capuche... J'ajoute que les not-so-great Inspiral Carpets connaissaient à peu près le même succès textile, avec leurs célèbres tee-shirts à vache... et d'ailleurs, tiens, je me pose la question, chers amis : comment avons-nous été assez cons pour porter des tee-shirts pareil, avec des grosses meuh meuh et des slogans façon Cool as fuck ???. Ah, âge béni de l'insouciante jeunesse...
Anyway. Vous n'êtes pas venu lire un blog sur les sweats à capuche, n'est-ce pas ? Alors revenons à la musique.
Le James que j'aime, sans vouloir être snob (j'espère), meurt un peu avec ses tubes. Non pas que tout ce qui vienne après ces "hits" joyeux et fédérateurs soit de piètre qualité, loin de là, mais il me semble que le groupe était plus intéressant quand il n'avait pas encore trouvé "sa" formule magique, ses sonorités bien à lui, sa rondeur un peu pompière, ses effets de manche et ses rythmiques carrées comme des bûcherons bavarois dans la force de l'âge.
Sur les deux premiers albums, et jusqu'à l'excellent "live" One man clapping, James donne l'impression de se chercher encore. Et c'est merveilleux à écouter. Les rythmiques restent heurtées, souvent cocasses, et en vérité très riches et stimulantes. Je pense évidemment que le groupe a perdu beaucoup avec le départ, à cette époque, du batteur d'origine, le foutraque et barbu et formidable et intenable Gavan Whelan (infos très intéressantes à son sujet via ce lien. Avec un cogneur aussi atypique aux commandes (comme chez les Woodentops), le trio basse-guitare-voix est obligé de se faire mal, de se creuser méchamment les méninges, pour s'accommoder de cette base rythmique qui refuse le calme, la plénitude. Chaque chanson est un combat, on sent que sa naissance ne s'est pas jouée en 5 minutes, ni même en 5 heures (et peut-être même pas en 5 jours). Pourtant, le résultat n'est jamais lourdaud, jamais jus de crâne. A cette époque bénie (disons 85-90), James, en bon monsieur Jourdain de la pop lunaire, fait du James sans le savoir. Et c'est ce qu'il fait de mieux.
Comme je l'écrivais dans le post précédent à propos du cas (rarissime) des Villagers, James a très vite trouvé son identité sonore, sa carte musicale génétique. Peut-être à l'instinct, peut-être par accident, peut-être aussi à force de combats internes, de frustrations et... de compromis (on aura confirmation dans les années 90 que la relation entre Tim Booth et Gavan Whelan avait été, lors des premières années, souvent orageuse, jusqu'à des bagarres en répétition).
Mais avec le succès, et le summer of love mancunien, James, au contraire de ce qu'il a connu jusqu'à là, ne doute plus de rien. Tout lui sourit. Et sa musique, à mon sens, perd de sa force. Tim Booth, lui-même, me semblera parfois manquer de conviction. Sur scène comme sur disque. Sa danse devient moins frénétique, son chant moins brûlant.
La part de doute s'effaçant, devient-il trop sûr de lui ? C'est possible, et je le crois... Le côté "artiste maudit" de ses premières années avec James, cette touche discrète de "freak man" qu'avait su reconnaître (et aimer) en lui l'homme de goût Stephen Patrick Morrissey, ci-devant chanteur des Smiths, se dilue peu à peu, et Tim Booth, rentrant dans le rang, devient la star à belle gueule éduquée des "charts" anglais.
Les albums de James ne sont plus confinés au rayon "indie pop", ils sont désormais à l'entrée des grands magasins britanniques, les Virgin, les HMV, en de larges et beaux "facings" promotionnels. L'album Seven, notamment (en 92), connaîtra un succès colossal, porté par les tubes Sound puis Born of frustration (ici en version en concert - et franchement, Tim, cette chemise !!). Je me souviens très bien m'être dit, à l'époque, que ces énormes ventes de disques étaient une chouette nouvelle pour le groupe et son chanteur si attachant, mais peut-être aussi, hélas, la fin d'un contrat tacite entre cet artiste hors-normes, ses compagnons d'armes assagis, et leur (pourtant assez nombreux) fans de la première heure.
Un autre souvenir, par association d'idées : à cette époque (1992, ou peut-être début 93), James vient donner une session à la Maison de la Radio, une Black Session organisé par Bernard Lenoir et sa fine équipe. Le triomphe est là, le groupe est énorme, Tim Booth tient sa revanche, mais il sait aussi que les critiques, dans les journaux, ne sont pas très enthousiastes. Voire même assez négatives, par exemple dans Les Inrockuptibles. Et Booth est furieux, il a le sentiment d'être trahi par ce petit journal français qui l'encensait deux ou trois ans plus tôt. A un moment, entre deux chansons, Lenoir l'interroge sur cet accueil critique, et Tim Booth se raidit. Et lorsqu'il répond enfin, après quelques secondes de silence, c'est pour dire que ces critiques pour le moins mitigées ne le touchent pas, et qu'il maudit cette "indie-police" donneuse de leçon (traduisez : les Inrocks). Et alors qu'il prononce ces mots d'acier trempé en articulant sèchement dans son micro, il se tourne vers la rangée de fauteuils, à moins de dix mètres de lui, où nous sommes assis à 3 ou 4 membres du journal (il me semble qu'il y avait JDB, et je crois aussi Anne-Claire Norot), et il nous fusille du regard, longuement. Ambiance...
En vérité (et Tim Booth me l'avouera un peu plus tard, lors d'une interview à Londres, sans doute pour l'album Laid), il se sent extrêmement blessé. Il a l'impression que James a bossé très dur, et il ne comprend pas que son groupe réformé, à la musique simplifiée, plus efficace et lisible par le grand public, ne fasse pas l'unanimité.
Et nous voilà (enfin ?) en 1993... et je réalise que ce blog est déjà bien long... et que je vais vous laisser là... avant un troisième volet des souvenirs mancuniens, dans quelques jours, si vous le voulez bien. •
PS : j'ai retrouvé, sur un site étranger, le classement des lecteurs des Inrocks pour l'année 93. Et détail amusant, le Laid de James y précède d'une place un certain album (bientôt réédité) d'un certain cher ami australien...
1993 Les Inrocks Readers Albums
1. Boo Radleys - Giant Steps
2. The Auteurs - New Wave
3. Divine Comedy - Liberation
4. Tindersticks - Tindersticks
5. The Breeders - Last Plash
6. James - Laid
7. The Apartments - Drift
8. Bjork - Debut
9. Suede - Suede
10. New Order - Republic
11. Moose - Honey Bee
12. Sugar - Beaster
13. Frank Black - Frank Black
14. Belly - Star
15. Dominique A - Si Je Connais Harry
16. Sylvain Vanot - Sylvain Vanot
17. The Posies - Frosting On The Beater
18. Trash Can Sinatras - I've Seen Everything
19. Dead Can Dance - Into The Labyrinth
20. The Lemonheads - Come On Feel
1. Boo Radleys - Giant Steps
2. The Auteurs - New Wave
3. Divine Comedy - Liberation
4. Tindersticks - Tindersticks
5. The Breeders - Last Plash
6. James - Laid
7. The Apartments - Drift
8. Bjork - Debut
9. Suede - Suede
10. New Order - Republic
11. Moose - Honey Bee
12. Sugar - Beaster
13. Frank Black - Frank Black
14. Belly - Star
15. Dominique A - Si Je Connais Harry
16. Sylvain Vanot - Sylvain Vanot
17. The Posies - Frosting On The Beater
18. Trash Can Sinatras - I've Seen Everything
19. Dead Can Dance - Into The Labyrinth
20. The Lemonheads - Come On Feel